Macbeth : Ce qu'un homme ose, je l'ose ! Viens à moi / Sous l'apparence de l'ours russe le plus farouche, / Du rhinocéros le plus hérissé, du tigre / Le plus féroce de l'Hyrcanie. Prends toute forme / Sauf celle-ci, et mes nerfs assurés ne trembleront pas. / Ou encore : revis, et défie-moi / Au combat à l'épée jusque sur la lande déserte / Et si je reste ici à trembler de peur, tu pourras me dire / Une poule mouillée.
Va-t'en, va-t'en, / Horrible spectre, image sans substance ! (Acte III, scène IV)
Dans cette adaptation de la nouvelle fantastique «Le Moine noir» d'Anton Tchekhov, Kirill Serebrennikov s'interroge sur le désir humain et irrépressible de liberté, sur l'art, le génie et l'autodestruction à laquelle ces tentations peuvent mener.
Écrit en 1959, ce grand classique du répertoire noir américain emprunte son titre à un poème de Langston Hughes, figure majeure de la Harlem Renaissance.
Un raisin au soleil est un texte essentiel pour comprendre la ségrégation raciale et sociale aux États-Unis, et les formes de résistance possibles.
Ce drame raconte la vie d'une famille du quartier noir de Chicago dans les années cinquante, qui rêve d'ailleurs dans un appartement usé par le temps.
Un chèque de pension de 10 000 $ vient semer la zizanie et divise la famille Younger. Que faire quand soudain tout devient possible ? Lena dite « Mama » décide d'honorer la vie de labeur de son défunt mari et achète une nouvelle maison pour sortir la famille de son taudis, décidant d'épargner le reste pour les études de médecine de sa fille. C'était sans compter sur le désespoir de Walter Lee, son fils, prêt à tout pour donner un sens à sa misérable vie, et la pression exercée par l'association de voisinage pour les faire renoncer à s'installer dans leur nouvelle maison, située dans un quartier blanc de Chicago, illustrant la pratique discriminatoire du redlining. Faut-il tenir tête à un monde hostile ou accepter la place qui nous est assignée ?
Dans le commissariat central de Milan, un « Fou » donne du fil à retordre à un agent de Police et au Commissaire Bertozzo : ils se livrent à un interrogatoire que le « Fou » démonte peu à peu, les déstabilisant et dévoilant peu à peu toutes les facettes de sa personnalité et de ses déguisements (juge à la Cour de cassation, capitaine de police puis évêque) pour faire éclater la vérité au grand jour. « Voyez mon dossier médical ; j'ai déjà été interné seize fois... et toujours pour la même raison : j'ai la manie des personnages. Cela s'appelle « histrionomanie », du latin istriones qui veut dire acteur. En fait, mon hobby, c'est de jouer sans cesse des rôles différents. » Avec un aplomb déconcertant, celui-ci se livre à une contre-enquête menée avec brio et un sens inné de la démesure sur le massacre d'état perpétré à l'encontre du cheminot anarchiste, Guiseppe Pinelli, précipité depuis la fenêtre du 4e étage de ce même commissariat, tandis que l'enquête officielle avait conclu à un suicide. Une affaire qui fit scandale en Italie et en Europe, mettant à jour les méthodes illicites utilisées pour forcer les aveux lors des interrogatoires. Une farce politique subversive qui s'illustre par la démesure de la supercherie mise en scène, la bêtise et l'impunité des puissants, la duplicité de la justice, et l'équilibre toujours fragile de la vérité.
Satire politique sur la corruption de la justice, écrite en 1970, Mort accidentelle d'un anarchiste est un hommage brûlant et plein d'esprit à la quête de la vérité et au rétablissement d'une mémoire bafouée.
Qui aime aller chez le dentiste ? Sans pathos, avec un humour mordant, le narrateur se souvient des séances trop fréquentes après-guerre chez le Dr Spodek. Mais à douleur, douleur et demie, le dentiste et sa femme vivaient une tragédie personnelle autrement plus pénible : comment faire le deuil de leurs deux filles ? Suivi de «Votre Maman» augmenté d'une scène inédite.
Anissa, 25 ans, décide de retrouver la trace d'un père qu'elle n'a jamais connu. «Au non du père» interroge ce qui fait lien entre un parent (biologique et d'éducation) et son enfant et comment cela oriente un parcours de vie.
Cette pièce vient clore la trilogie des « Points de non-retour » débutée avec [Thiaroye] en 2018, suivie de [Quais de Scène] en 2019, formant ainsi une grande fresque historique aux récits intimes enchâssés. Poursuivant son exploration des récits manquants de l'histoire postcoloniale française, Alexandra Badea s'attache ici à un épisode lui aussi largement méconnu : les « enfants de la Creuse ». Le transfert d'enfants réunionnais organisé par les autorités françaises, dans le but de repeupler certains départements victimes de l'exode rural dans les années 1960 et 1970. Qui sont ces enfants déracinés, qui peuplaient les foyers de la DDAS dans les années 1980 ? D'autres récits d'abandons viennent s'y articuler, posant la question de la responsabilité de l'État dans cette vaste entreprise de déportation.
Dans un foyer abandonné, envahi par la végétation, Nora (figure récurrente des autres volets de la trilogie) réalise un documentaire sur les « enfants de la Creuse » pour saisir des traces de sa mémoire familiale. Elle rencontre trois anciens pupilles qui, trente ans auparavant, ont séjourné dans ce foyer, aujourd'hui dévasté par le temps.
S'articulent ainsi mémoire familiale, générations sacrifiées et pages effacées de l'histoire contemporaine, mettant à jour les interférences politiques dans un espace intime anéanti.
Tendre et doux souvent, âpre et violent parfois, l'amour maternel est une force qui peut tout emporter sur son passage. À travers les neuf nouvelles de ce recueil, les auteurs explorent différentes facettes de ce sentiment et dressent des portraits de mères, entre rires et larmes.
Huit heures ne font pas un jour forme ce que l'on appelle aujourd'hui une « mini-série » en cinq épisodes, diffusée à la télévision allemande d'octobre 1972 à mars 1973, et trois épisodes supplémentaires non réalisés. Cette minisérie décrit la vie quotidienne d'une famille de la classe ouvrière en Allemagne de l'Ouest, entre utopie prolétaire post-« 30 Glorieuses » et fresque sociale reflétant l'anticonformisme culturel des années 1970.
Sans naturalisme feint ni goût prononcé pour la caricature sociale, Fassbinder y aborde les mécanismes d'oppression, l'aliénation par le travail à l'usine, lieu d'exercice de l'autorité des contremaîtres et des patrons, le désir d'émancipation par le travail chez les femmes, l'opportunisme insidieux de la presse, l'essor du consumérisme avec l'ouverture de l'Allemagne de l'Ouest au libéralisme occidental, ou des sujets plus tabous comme le désir amoureux des personnages âgées.
Loin du documentaire social, c'est une démarche fictionnelle que privilégie Fassbinder, qui joue de manière délicieusement subversive avec les codes de la représentation télévisuelle. Dans une démarche totalement novatrice et visionnaire, comparable à celle des romanciers réalistes du 19e siècle, le réalisateur s'attache ici à la représentation d'un monde social, le milieu du prolétariat ouvrier, qui n'était traditionnellement pas « montré » dans les fictions télévisées.
Ces pièces de Lars Norén dont l'écriture s'étend de 1980 au début des années 2000 dressent une peinture tragique et sensible de son univers théâtral, où une violence inouïe investit le réel. Elle s'introduit dans les relations intimes, dans les espaces mentaux des personnages irrépressiblement vivants, en dépit de leur désir de mort. Xénophobie, parricide, meurtres, violence conjugale, huis clos familiaux insoutenables. Pas de psychologie mais une prise directe avec l'inconscient, et une fragilité psychique qui se livre sans fard.
Les personnages de ces tragédies contemporaines semblent des exilés du présent, des âmes errantes, en quête d'une rive où accoster pour survivre.
Selon Alfred de Vigny, Chatterton aurait été composé en dix-sept nuits, sous le signe du silence et de l'ascèse, dans les affres d'une création vouée à un dessein élevé : mettre en scène un poète maudit afin que le public s'émeuve du sort des artistes pauvres. Pour y parvenir, Vigny s'inspire de la brève existence du poète Thomas Chatterton, qui s'est donné la mort à la veille de ses dix-huit ans, après avoir souffert de l'humiliation et de la faim. À partir de l'exemple d'un seul, le dramaturge entend toucher le coeur de tous.
Certains ont lu dans Chatterton une apologie du suicide, d'autres une pièce étrange car sans action. Ce « drame de la pensée » a toutefois remporté un triomphe à sa création, en 1835, et nombreux furent ceux qui se reconnurent en Chatterton.
Un cimetière à la fin de l'automne. Un homme et une femme se croisent sur un banc. On devine une relation amoureuse passée - ou à venir ? Autour d'eux tout le monde s'affaire, s'agite, le temps semble s'accélérer, toujours en suspens. Que s'est-il passé ? Des fantômes ou flottements de présences nichés dans les souvenirs, qui évoquent ces « voix des limbes » dont parlait Jacques Lassalle.
Au centre de Et la nuit chante, un couple : lui passe son temps à lire, allongé sur un canapé et voit passer sa carrière d'écrivain qui s'effiloche ; elle désire une autre vie et cherche à s'évader de cette médiocrité du quotidien. Ils ont un bébé et les parents du jeune homme viennent voir leur petit-fils, mais disparaissent aussitôt arrivés. Une nuit, alors qu'elle est sortie en ville, le jeune homme regarde par la fenêtre et attend son retour. L'aurait-elle quitté pour de bon ? La pièce a été adaptée à l'écran par Romuald Karmakar en 2004
De quoi s'agit-il ? D'un François Ier libertin et jouisseur, oublieux de ses devoirs, séduisant toutes les femmes, les violant même parfois, et de son valet, Triboulet, un fou méchant à la cour et mélancolique en privé, un père exclusif et jaloux d'une fille encore vierge.
De cette pièce, Verdi a tiré un de ses chefs-d'oeuvre, Rigoletto.
La tragédie du roi richard ii richard ii (1595) est un conte d'hiver aux accents plus tristes que violents, sans batailles, dans une atmosphère de soleil couchant.
Le roi est une figure mystérieuse et tragique, autant victime de lui-même que de bolingbroke, son cousin usurpateur : " je donnerai (...) mon vaste royaume pour une petite tombe. " devenu poète, il aura le ciel pour domaine. richard meurt au son d'une musique jouée par un petit palefrenier / le soleil qui se couche, le finale d'une musique, comme l'arrière-goût d'une saveur douce, ont une douceur qui dure, se gravent plus dans la mémoire que des choses longtemps révolus.
(acte ii scène i)
Des intrigues politiques de Boris Godounov à la rivalité de Mozart et Salieri, en passant par la tragédie du visiteur de marbre : l'oeuvre théâtrale de Pouchkine est d'une richesse sans équivalent. Si l'on connaît bien en France la prose de l'auteur d'Eugène Onéguine et de La Fille du capitaine, la traduction de ses vers est un exercice de taille auquel peu se sont confrontés.
Andreï Vieru, auteur, traducteur et musicien reconnu, s'attelle à la tâche. Dans cette nouvelle traduction, une attention particulière est portée à l'usage d'une langue française d'époque, celle dans laquelle Pouchkine, qui avait failli devenir un écrivain français, rédigeait luimême ses lettres.
Décor : une cellule de prison.
Personnages : le surveillant et trois détenus : yeux-verts, vingt deux ans, condamné à mort ; maurice, dix-sept ans, qui lui voue une admiration sans bornes ; lefranc, voleur de vingt-trois ans dévoré par la jalousie. dans ce huis clos, tout est drame : un lit défait, un mot de trop. mais la tragédie naît d'une femme absente, celle que yeux-verts va laisser en mourant sur l'échafaud. maurice et lefranc la convoitent, se la disputent sous le regard de yeux-verts.
Jusqu'au meurtre : lefranc étrangle maurice " j'ai fait ce que j'ai pu pour l'amour du malheur, dit-il. je suis vraiment tout seul ".
Cette pièce en un acte a été créée au théâtre des mathurins le 26 février 1949.
Jean genet en a remanié le texte en août 1985. cette nouvelle version est publiée ici pour la première fois.
Sygne de Coûfontaine doit épouser le préfet Turelure pour obtenir la libération du Pape, détenu en otage. En 1814, le roi est restauré, Georges, le cousin de Sygne, vient tuer Turelure, Sygne s'interpose et meurt. Turelure est nommé comte par le roi. Loin de se restreindre au temps précis de la Révolution et de l'Empire, L'Otage est l'illustration d'un débat universel, actuel et virulent à toutes les époques. Le conflit du Pape et de l'Empereur, la rivalité du pouvoir temporel et du pouvoir spirituel, « l'Otage divin que les passions humaines essayent de s'arracher et de se partager », écrivait Claudel, est une situation qui s'est plusieurs fois présentée dans l'Histoire.
(drame en trois actes).
Ce diptyque théâtral réunit deux récits familiaux, portés par la figure de Frida. La jeune enfant, figure muette mais toujours présente, provoque chez ses parents un besoin d'amour exclusif. Derrière l'apparente légèreté des échanges domestiques se déploie une chorégraphie de possession de l'enfant, avec chantage affectif et recherche permanente d'ascendant sur l'autre parent. Si la première pièce se concentre sur le trio père-mèreenfant, la seconde élargit le cercle familial aux grands-parents, à qui Elle et Magnus rendent visite pour les vacances au bord de la mer. L'insistance à affirmer le bonheur d'être là révèle peu à peu un profond malaise. Alors que les pleurs de la grand-mère semblent taire un terrible secret, Magnus décide de partir seul avec Frida sur la côte sud.
Les compositions de Brattberg, musicien de formation classique, s'illustrent par la finesse d'un rythme syncopé, avec ses jeux d'échos et e ses silences. Une écriture musicale qui gagne en efficacité dramatique par son économie de mots Les mêmes scènes se répètent, avec de légères variations, où viennent se nicher, par la mise à distance et la dérision, la tension familiale et les obsessions individuelles
Le retour au théâtre d'Alejandro Jodorowsky, fondateur et animateur avec Fernando Arrabal et Roland Topor de cet extraordinaire phénomène artistique littéraire et théâtral que fut le Panique.
Dans l'Opéra panique, les questions existentielles engendrées par l'Absurde émergent impétueusement sans avoir rien perdu de leur force.
Marcus, directeur de théâtre, réunit sa troupe après deux ans de silence. Les artistes ne se sont pas revus depuis la mort de Mathilde, sa compagne, cinéaste engagée assassinée par un terroriste après la sortie de son film dénonçant les rouages du « système ». Face à la défaillance policière, Marcus a mené sa propre enquête et retrouvé l'assassin. Apprenant qu'il le tient séquestré dans son théâtre, ses amis ont désormais la responsabilité de décider du sort de l'individu.
Jeunes filles en uniforme, pièce d'abord intitulée Hier et aujourd'hui, est un drame lesbien. La pièce (1930) conte la passion qui naît entre une élève et une enseignante dans un pensionnat de jeunes filles soumis à une discipline de fer. Christa Winsloe y critique le militarisme prussien de l'entre-deux-guerres et une éducation destinant les jeunes filles à devenir des mères de soldats.
La pièce eut tant de succès qu'elle fut adaptée au cinéma dès l'année suivante par Leontine Sagan. La pièce et le film, avec les sous-titres de Colette, rencontrèrent aussi un grand succès en France en 1932. L'Allemagne nazie interdit vite les deux oeuvres.
Le film est ici proposé sur support DVD pour la première fois en France, en version originale, sous-titré par Colette avec l'autorisation de ses ayants-droit. Il a été édité sur le même support en 2021, avec sous-titres anglais seulement, par le British Film Institute.
La Roussalka porte le nom de ces créatures mythiques, les ondines, qui attirent par leur chant les hommes afin de les noyer. De cette figure issue de la mythologie internationale, Pouchkine a tiré une oeuvre envoûtante. Dans un monde fantastique, la fille d'un meunier succombe au charme d'un prince et se suicide en se jetant dans la Dniepr. Transformée en ondine, elle envoie à son cher et tendre qui vient de se marier la fillette née de leur amour afin de lui signaler que la jeune paysanne l'aime toujours et l'attend près de l'eau ; à ses risques et périls de répondre à cette invitation...